jeudi 16 juillet 2009

La bavure à l'échalotte



J'en parlais récemment à Butch, un baveur, c'est sale. Crotte, zut, étrons chauds et mous. Très très dégueu. Un vrai baveur, s'entend, à savoir le gros baveur syndicaliste milicien en bottes, qui peut se transformer occasionnellement en criminel selon le contexte (important, le contexte, j'en ai déjà dit un mot) - ce qui arrive fort heureusement assez peu, finalement, même si c'est toujours trop -, ça fait très très, mais alors très mauvais effet. Ça discrédite son mouvement social, ça remue la base et les troupes, ça scandalise les honnêtes militants (ils sont rares mais quand même, ça pourrait se répandre dans la presse).

En revanche, imaginons toute une série de petits accidents, sabotages, menaces, séquestrations "bon enfant", ou racket contre rançon en espèces sonnantes et trébuchantes. Opérations paramilitaires violentes mais où l'intimidation est l'élément clef pour instaurer la peur des milices syndicales. Elles-mêmes soumises au gratin du Cancer Général du Travail, à l'élite Sudiste, au patronat de Farce Ouvrière, ou même la fine fleur du Front de Gauche tout mélenchonité qui défend bec et ongles ses privilèges contre l'envahisseur étranger, travailleurs immigrés et autres plombiers polonais. La milice syndicale en pleine ratonnade d'immigrés, avec l'aide des gros bras au crâne rasé du NPA, ça la fout mal quelque part.

C'est peut-être à ça que servent les lacrymos et les bonbonnes de gaz.

Prenons un peu de recul et mettons un moment de côté une légitime indignation devant de telles méthodes mafieuses, pour tenter de réfléchir non à l'usage de la bobonne lacrymo, mais à la charge émotionnelle que celle-ci est en train de porter.

Nous à gôche, on questionne le symbolique.

Quelques blessés légers, une évacuation musclée, ce n'est pas beaucoup quand on pense au succès de cette opération de nettoyage. Parce qu'en plus, le milicien d'extrême gauche, il a du mal à supporter le bruit et les odeurs. Déjà que ces étrangers, ils connaissent rien à la gréviculture, apprise dans la sueur du folklore de l'Huma. Cette belle identité à la pureté antinéolibérale saillante. Et en plus ils sont même pas syndiqués, preuve qu'ils n'ont rien à voir avec nous autres surhommes musclés du NPA.

Bref, foin de détail, l'important c'est de prendre son pied et de placer les coups de bâtons aux bons endroits pour que ça ne laisse pas trop de traces. L'idéal c'est des coups de planche, bien plates et bien dures.

Quelques ecchymoses, bleus et bobos, objectivement, ce n'est pas beaucoup. Et puis un travailleur sans papier, ça a tendance à la fermer, à éviter de porter plainte. Mais l'essentiel, ce qui compte ici ce n'est pas tant le nombre de victimes que le message envoyé, qui va considérablement au-delà de sa bêtise effective. Pas tellement les exécutants en treillis et lunettes de plongée (souvenirs ramené des camps d'entraînement estivaux); non ce qui compte c'est le message envoyé par la hiérarchie du parti, par la nomenklatura syndicale.

Ces actions disent clairement "vous qui participez à une occupation des locaux CGT, qui vous opposez aux blocages de facs, vous risquez d'être gracieusement apostrophés par nos camarades... A coup de barres à mine."

Ces actions disent aussi vous avez intérêt à ne pas nous envoyer de balles de caoutchouc dans la pomme, sinon on détruit encore plus d'équipements publics et privés et vous en serez réduits, en dernière extrémité, à devoir commettre une "bavure" que nous saurons exploiter médiatiquement, puisque les médias sont bienveillants à notre égard .

Et puis on y a tout intérêt.
C'est. Certain.
Il y a même de fortes chances que ça fonctionne dans les médias.
L'émotion de la télévision, n'est-ce pas.
Les journalistes sont aussi des être humains qui peuvent être manipulés.
Ce qui est on ne peut plus profitable.

Partant, contester se fera sans risques et rapportera gros.

Eh oui : il faut leur montrer qui commande ici, c'est pas une bande de péquenots qui vont couler nos droits nationaux sozialistes si chèrement acquis de hautes luttes. Où va-t-on si on commence à accepter que des zétrangers non syndiqués acceptent de faire les mêmes boulots avec plus de souplesse, moins de chantage? Ce serait la fin des zakis sociaux !

Or, personne n'a oublié que les gens du "N"PA tentent de nous faire croire que nous vivons sous une droite régime "libérale"-sécuritaire qui fait son beurre du climat de trouille que le même "N"PA entretient pourtant soigneusement, et que sa communication politique n'aboutissant qu'à un nihilisme généralisé, il est raisonnable de penser que cette extrême gauche a tout intérêt à étouffer dans l'oeuf toute velléité de rétablissement de l'État de droit un peu forte quitte à calmer les non-grévistes avec quelques baffes. Si ça suffit pas, on fera exploser l'outil de travail, pour être bien sûrs d'éliminer toute dissidence.

Notre gentillesse sera impitoyable.

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